Être confiné, c’est participer à l’effort collectif pour stopper le Covid-19, et éviter à soi-même et aux gens qui nous entourent d’être contaminé. C’est aussi vivre un nouveau quotidien, au sein duquel les activités qui nous occupent et nous divertissent habituellement ne sont plus toutes accessibles. Ainsi, bloqués à la maison, être confinés signifie pour beaucoup s’ennuyer...
Mais si l’ennui avait du bon ?

Extrait d’un entretien avec Serge Tisseron, psychiatre :

« La peur de l’ennui semble être une préoccupation majeure en cette période de confinement. D’où vient cette angoisse ?
Habitués à courir toute la journée, beaucoup de gens ont vécu l’angoisse du vide à l’annonce du confinement. En temps normal, même lorsque nous restons immobiles, nous sommes confrontés par des outils numériques à des images très colorées, très mobiles et très émouvantes. Nous avons l’habitude de courir sans arrêt, au physique comme au mental. L’idée de passer d’un rythme effréné à un emploi du temps plus vide était donc effrayante. En réalité, les gens n’ont pas peur du vide mais d’être dans l’incapacité de gérer leur disponibilité.
(...)
Ce n’est pas la peur de l’ennui qui est la plus à craindre. C’est la réponse que nous apportons à cette peur.

Cette période de confinement serait-elle le moment idéal pour (ré)apprendre à s’ennuyer ?
S.T : Je n’aime pas vraiment le mot « ennui ». Pour les Romains, l’ennui, c’était le taedium vitae. C’est-à-dire le dégoût de la vie, le fait de ne plus être intéressé par rien. C’était ce qu’on appelle aujourd’hui la dépression. On ne peut donc pas dire qu’il faut s’ennuyer, ça serait dramatique. Je préfère parler de « disponibilité à soi ».

Alors, comment retrouver cette « disponibilité à soi » pendant le confinement ?
La disponibilité, ça veut dire « voir ce qui est beau ». Et ça peut être de toutes petites choses, qu’on peut voir à sa fenêtre. Globalement, le monde n’est pas beau mais si on découpe le monde en petits morceaux, on trouve des choses magnifiques. Tout le problème est d’arriver à ce découpage, c’est ça être disponible à soi. »

Huot, A. (31 mars 2020). Confinement : ce n’est pas l’ennui qu’il faut craindre, mais la façon dont nous y répondons, L’ADN, consulté sur https://www.ladn.eu/nouveaux-usages/usages-et-style-de-vie/confinement-arretons-avoir-peur-ennui/

Extraits d’un article de la revue Parents, citant Teresa Belton, experte américaine dans l’impact des émotions sur le comportement et l’apprentissage des enfants (chercheuse à l’université de East Anglia) :

« L’ennui est vécu comme un "sentiment de malaise" et la société a décidé qu’il fallait être constamment occupé et constamment stimulé. (...) Or, poursuit-elle, « au nom de la créativité, peut-être aurions-nous besoin de ralentir et de rester déconnectés de temps en temps. »

Pour Monique de Kermadec, psychologue française spécialiste de la précocité citée dans le même article, « l’enfant doit s’ennuyer afin qu’il puise en lui ses propres ressources « personnelles ».

Diego, C. (18 avril 2018). Laissons les enfants s’ennuyer !, Parents, consulté sur https://www.parents.fr/enfant/psycho/aider-son-enfant-a-progresser/laissons-les-enfants-sennuyer-79744

Alors, bénéfique l’ennui ?
Si le confinement nous force à devoir revoir l’organisation de nos journées et le choix de nos activités, il pourrait bien recouvrir plusieurs bienfaits : créativité, disponibilité pour mieux s’écouter et écouter les autres... et développement de sa conscience citoyenne ?
Rester chez soi, nous le savons, revient à protéger ceux qui nous entourent. Et selon une étude de 2011 relayée par le Guardian (https://www.theguardian.com/science/2011/may/06/boredom-good-for-you-claims-study), l’ennui lié aux mesures actuelles pourraient aussi « motiver les individus à vouloir accomplir des tâches peu plaisantes, mais porteuses de sens, comme un don du sang..."
A méditer !

Une rubrique proposée plusieurs fois par semaine pour mieux comprendre comment être un citoyen du monde tout en restant confiné chez soi.

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